Les sous-titres, c’est pas automatique ! 

Moi en train de présenter la conférence devant une salle remplie à Paris Web. Sur l'écran est indiqué le titre suivant : "je veux un vrai sous-titrage !"

La nouvelle tendance sur internet est de publier un média vidéo (enregistré ou en live) quel que soit le réseau. Je n’ai pas mis d’images volontairement car je ne veux pas viser qui ce soit.

Blanc sur blanc : des sous-titres blanc incrustés dans l’image de la vidéo

L’intention d’incruster des sous-titres part très certainement d’une bonne intention. Une vidéo, c’est une image qui bouge, en l’occurrence qui a des couleurs qui varient de temps à autre. Il peut arriver qu’on ait des zones claires voire blanches sur le bas de l’écran : du blanc sur du blanc. 
Ça devient vite illisible.

Astuce : si vous incrustez le sous-titre sur la vidéo, mettez un fond noir opaque pour améliorer la lisibilité. En plus, vous aiderez les personnes qui ne voient pas très bien les contrastes de couleur. Désactivez le sous-titrage automatique si c’est le cas d’un sous-titrage incrusté. Vaut mieux un bon sous-titre que 2 mauvais.

Automatique : des sous-titres générés automatiquement 

Excellente idée, cela permet de gagner un temps précieux puisque l’interface fait le travail toute seule. Il peut y avoir une reconnaissance de la bande sonore. On y retrouvera souvent la transcription automatisée de la parole et des indications s’il y a une présence de musique.
Par contre, attention, s’il y a un usage des termes un peu techniques ou spécifiques, ça part très vite en sucette. Activer c’est bien, vérifier c’est mieux ! 

Astuce : exportez les sous-titres et vérifiez le contenu de ces sous-titres s’ils correspondent à ce qui est sur la bande sonore. S’il vous reste un peu de temps, essayez de couper les phrases correctement. C’est assez pénible de devoir recoller les morceaux quand c’est mal coupé, non ? 

Les 2 premières minutes : des sous-titres au début de la vidéo

Une vidéo sous-titrée, c’est génial ! On se laisse vite prendre par la vidéo et au bout de 2 minutes il n’y a plus de sous-titres. 
À qui ce n’est pas arrivé de regarder une vidéo en se disant : « c’est bon, je suis tranquille pas besoin de mes écouteurs ». Et plouf, les sous-titres disparaissent.
Soit il y a un souci de licence (gratuit vs payant), soit vous avez eu une coupure dans votre action et vous avez oublié par la suite, soit la flemme de finir parce que c’était trop long. 

Astuce : faites les choses jusqu’au bout ! Imaginez qu’on fasse la même chose avec le son 🙂

Placement du sous-titre sur la vidéo

Un réel qui a des sous-titres incrustés, génial d’y avoir pensé ! Souvent, les sous-titres sont pas bien placés selon le support de diffusion. Les réseaux sociaux ont chacun leurs spécifications techniques. Par exemple sur instagram, les informations de la vidéo vont être au même niveau que le sous-titre, il faudra mettre l’écran en pause à chaque affichage de sous-titre. C’est, comment dire… pénible !

Astuce : Adaptez le positionnement du sous-titre comme vous adaptez le format de la vidéo qui est diffusée. 

Les sous-titres, ce n’est pas automatique !
Il y a encore des habitudes à prendre pour que tout le monde, moi la première, puisse y accéder confortablement. 

C’était l’avant-dernier billet pour clore ce calendrier de l’avent 2022.
Vous pourrez me retrouver sur mon blog : https://www.sophie-drouvroy.com en 2023

Jour 23 – La photo a été prise par un photographe lors de l’édition 2011 de Paris Web. (faites moi signe pour que je crédite la photo !)

10 choses à ne pas faire avec une personne sourde

Deux implants cochleaires Nucleus 7 face à face formant un cœur au centre de la photo

Il est parfois bon de rappeler les choses basiques

  • offrir une paire d’écouteurs à une personne implantée, le son passe plus par la cochlée !
  • offrir une place de spectacle, sans avoir vérifié avant si c’est accessible ou si c’est visuel
  • s’éclairer à la bougie sous prétexte de sobriété énergétique, un bon éclairage est important
  • cacher votre bouche avec ses doigts ou de parler la bouche pleine, la lecture labiale sera plus facile
  • crier, articuler exagérément ou même sourire en parlant, ça déforme la lecture labiale, parlez normalement
  • évitez les bruits de fond, c’est difficile de faire la différence entre la parole et le fond sonore
  • parler tous en même temps, je vous écoute et je mobilise toute mon énergie pour comprendre
  • parler dans le dos, ça ne sert à rien mes yeux sont pas derrière la tête, je lis sur les lèvres
  • reformuler votre phrase tout de suite sans avoir essayé de la répéter une fois ou deux, j’ai un cerveau mais je ne suis pas une machine à comprendre
  • rester complètement immobile, votre corps et votre gestuelle communiquent aussi !

Je suis fatiguée mentalement

Perspective du tunnel rouge de l'opera avec son tapis roulant

Il y a des matins comme celui d’aujourd’hui qui arrivent, ils sont spéciaux. 

Spéciaux parce que je suis fatiguée mentalement, 
Spéciaux parce que j’ai donné une autre image que celle que je ressens, 
Spéciaux parce que le trajet en métro n’est pas toujours marrant, 
Spéciaux parce que les tristes nouvelles c’est pas toujours facile à accepter et il le faut, 
Spéciaux parce que je veux rester dans ma bulle de silence,
Spéciaux parce que je suis fatiguée mentalement tout simplement. 
J’ai envie de silence même si je veux comprendre et voir les personnes qui m’entourent.

Parfois, c’est juste le démarrage de la journée qui est compliqué… Ça arrive à tout le monde. 
Parfois, j’ai envie de rendre les armes mais je tiens bon. 

Parce que je ne veux pas que la dépression reprenne le dessus.
Parce que je ne sais pas pourquoi je suis comme ça, j’essaie de trouver des excuses, des solutions.

Il faut juste accepter d’être comme ça. 

J’ai pris ma tasse de café double ration, mes deux tranches de brioches et je me suis installée pour commencer ma journée de télétravail. La première visio m’a mise de bonne humeur. J’ai continué sur ma lancée jusqu’au déjeuner. 

À midi, j’étais inspirée pour écrire mais j’ai été interrompue par mon petit monde. J’ai oublié finalement ce que j’avais en tête. 
Quelqu’un hier m’a dit « les écrits restent, les paroles s’envolent ». Cette personne avait raison de me rappeler cette expression. 

Cet après-midi, j’ai repris ce que j’avais à faire.

Dans mon métier, je fais des audits d’accessibilité. J’ai à coeur de bien faire mon travail mais ce n’est pas toujours aussi simple qu’on le croit. Je pourrais penser que je suis nulle, que je sais pas, mais en fait, je suis persuadée d’être en apprentissage permanent. Je n’ai pas envie de perdre mon énergie. 

Accepter et savoir dire « je ne sais pas »,  c’est à mes yeux important. 
Reconnaître que je peux me tromper, que je me suis trompée, c’est tout aussi important. 
Être humble, c’est bien aussi.
Ça ne fait pas de moi une personne mauvaise ou incompétente. 
C’est un sentiment désagréable pour moi, mais je reste convaincue que c’est ce qui fait ma force. 

Par contre, une chose qui m’agace profondément. Je ne dis pas que tout le monde doit être parfait, tout savoir mais…

les choses simples de l’accessibilité, comme les alternatives textuelles des images, les contrastes de couleur, et bien d’autres choses… 
Quand je repense aux remarques qu’on m’a faites au sujet de la mise en accessibilité dans le passé du type « ah mais c’est pas dans le cahier des charges », « on est pas payés pour ça ». 

Je dis : Ca suffit. 

Même moi, quand je déroule ma timeline des réseaux sociaux, je vois encore des podcasts qui n’ont pas de transcription écrite, et je me dis qu’on m’a encore laissée au bord de la route. 

Le monde que j’avais imaginé devient de plus en plus utopique. Je suis fatiguée mentalement de réclamer ce droit qui m’est dû aussi alors que je fais de mon mieux. 

Cher Papa noël,

Sophie, assise sur les genoux d'un Père Noël qui fait 2 mètres 50 de haut.

J’ai aimé penser que tu étais une vraie personne qui parcourais le monde en traineau avec tes rennes. Enfant, je me demandais comment tu pouvais livrer des cadeaux par milliers, comment tu faisais sans cheminée ? 

Le sapin était décoré, Petit Papa Noël de Tino Rossi marchait souvent. Je ne comprenais pas les paroles, ni la mélodie, mais l’amour et l’ambiance y étaient. Je m’appliquais à bien poser le vinyl correctement sur la platine. Mettre ce diamant qui permettrait à ma famille d’entendre cette jolie musique sortir de cette boîte. 

Les soirs de décembre, quand il faisait nuit noire, je montais sur ce grand bureau noir accolé à la fenêtre. J’y guettais quelque chose. Quelle forme ? Quelle couleur ? Rouge certainement. 
Quand la neige tombait, c’était encore plus beau à voir, c’était magique pour moi. Dans ces moments-là, je me rappelle que je n’avais pas mes appareils le soir. C’était souvent avant d’aller me coucher. La neige est associée au silence pour moi. Le paysage devenait blanc et je t’imaginais en train de braver les flocons de neige. 

Mon esprit avait mille et une idées pour ton voyage du 24 décembre.
Même si tu en avais l’habitude, ça ne devait pas être simple pour toi ce soir particulier. Tu arrivais à déjouer les fuseaux horaires pour que tout le monde ait son cadeau. 

Mon cousin du même âge que moi, me soutenait que le Père Noël savait ce que je voulais et qu’il passait parfois par la porte ou la fenêtre. Le soir du réveillon, nous allions tous ensemble avec les cousins dans un coin à l’écart au calme pour attendre le Père Noël. Il passait et déposait ses paquets au pied du sapin. L’excitation était à son comble dans ces moments-là du plus vieux à la plus jeune. 

Nous étions une bonne douzaine d’enfants. J’étais la seule à ne pas entendre. Tous sensibles à ce détail, qu’ils faisaient tous attention à ne pas m’oublier, j’ai vécu mes plus beaux noëls avec eux. Ils me donnaient les informations qu’ils pouvaient obtenir ou entendre. Je me rappelle d’une année d’un de mes cousins dont j’étais très proche, il était tellement expressif que je comprenais à son visage ce qui se passait. 

J’ai longtemps cherché à savoir comment je pouvais communiquer avec toi.
Quand je me suis retrouvée devant toi à 5 ou 6 ans, je n’ai pas pu te parler. J’étais trop intimidée par la personne que tu es. Je ne pouvais pas te comprendre. Tu as une magnifique barbe blanche, douce et épaisse.

Je n’ai pas oublié ma liste au Père Noël, je sais que je suis pas super en avance.
Mais j’ai été sage ! Je me suis appliquée à bien travailler, un peu trop même. Ca va beaucoup mieux. J’en ai tiré des leçons. Et quelques bêtises, tu verras, rien de bien terrible. 

J’ai un voeu que j’aimerais réaliser en 2023 : un projet d’écriture.
Peut être que tu pourras m’aider à le réaliser, à trouver une maison d’édition ? 

Merci Papa Noël, 

PS : voici mon email : sdrouvroy arobase gmail point com
Jour 20 du calendrier de l’avent – Ce billet est dédié à mes cousins et cousines… ❤️

J’ai un sosie !

Chatte noir qui baille aux corneilles, la langue rose et les crocs bien visibles. On la voit sur une couverture arc-en-ciel

Plus exactement, je rencontre tout le temps des sosies labiaux. Ça me semblait important d’interpeller votre attention sur ce sujet. On en parle très peu et pourtant on les rencontre tous les jours. Ils sont nombreux.

Qu’est ce que c’est ?

C’est quand deux mots ont la même image labiale.
Par exemple, les sons « a » et « an » sont très proches en lecture labiale. Les sons « p », « b », « m » ou « f » et « v » ont exactement la même lecture labiale.
Je peux confondre un mot à un autre.

Ca arrive à tout le monde et alors ?

J’entends mais je ne comprends pas tout. C’est un peu la dictée à trous qui fait partie de ma vie. C’est un exercice énergivore, c’est une véritable gymnastique du cerveau. Je suis souvent sauvée par le contexte de la conversation, des phrases. Ne soyez pas surpris quand je suis en mode « j’ai pas compris ». Parfois, il suffit simplement de répéter la phrase et si je n’ai toujours pas compris alors il faut changer le mot et pas la phrase pour que je puisse m’y retrouver.
Honnêtement, ça génère de la fatigue sonore.

J’adorais ça quand j’étais jeune car j’étais dans ma zone de confort à l’école avec ces dictées que mes camarades n’aimaient pas. Je trouvais toujours les bons mots. Il faut bien trouver des avantages ! Mais au bout d’un certain temps, c’est moins drôle.

À quoi ça peut ressembler ?

Voici quelques exemples qui reviennent souvent :

  • Mets ton pantalon / Bois ta menthe à l’eau.
  • Va prendre le bain / Va prendre le pain.
  • Il va acheter un pull / Il va jeter une poule / Il va acheter les moules

Niveau de lecture

Ma lecture labiale ne sera pas la même qu’une autre personne sourde. Nous avons tous et toutes des niveaux différents. Depuis que j’ai mes implants cochléaires, quand je suis dans un environnement calme, je me sers moins de la lecture labiale. Le son que je perçois va de pair avec ce que je lis.

Parfois, je suis dans un environnement sonore, festif, et là, je vais pas m’appuyer sur ce que j’entends mais sur ce que je vois.

Toujours pas convaincu ?

C’est une situation qui est certainement arrivée à plusieurs d’entre vous. Quand vous êtes au café et que vous attendez votre interlocuteur. Vous êtes pressés d’échanger avec elle, la tentation de communiquer est grande. Essayez de parler avec cette personne à travers la vitre. Vous aurez bien des surprises sur ce que vous aurez compris.

Voici une situation cocasse qui m’est arrivée pas plus tard que cette semaine.

— Tu feras une aloche à ton mari de ma part.
— Quoi ?
— Tu feras une aloche à ton mari !
— Quoi, une taloche ? Non mais ça va pas la tête ?
— Mais non, une aloche !
— Je ne comprends pas !
— Mon interlocuteur mime le mot.
— Je ris aux éclats, j’en pleure.

Avez vous deviné ? 🙂

Déconnectons-nous !

Enceinte de musique allumée, on voit le bouton entouré d'une lumière bleue

À l’heure où tout le monde prône la déconnexion, mais aussi réduire l’usage des objets connectés et en même temps a peur de cette pénurie d’énergie. 

Je suis presque certaine que vous oubliez que ces objets connectés peuvent avoir une utilisation autre que celle qui a été prévue initialement.

Pensez à la télécommande de votre télévision, les SMS !

Ces objets connectés me permettent à moi, personne sourde, d’être autonome. 

Sans ma montre connectée, je ne me réveillerais pas en silence sans réveiller ma moitié,
Sans mon smartphone, je ne pourrais pas rester en contact avec des personnes qui ne sont pas familières d’internet
Sans mon ordinateur, je ne pourrais pas faire mon métier, ni être au courant de tout ce qui m’entoure quelle que soit la langue. 
Sans mes implants cochléaires, je ne vous entendrais pas. 

Alors oui, il y a des choses non connectées qui pourraient les remplacer. Je déconnecterai dans la mesure du possible sans mettre en péril mon autonomie.

Mais cela me demanderait tellement d’énergie en plus de ce que j’utilise tous les jours. 

Chroniques d’une mélancolique

Je n’ai pas vu ma semaine passer. Chaque jour a été différent. Tantôt heureux, tantôt triste.

Tous les jours, avoir le sourire,

Tous les jours, essayer d’avancer,

Tous les jours, essayer de voir mes objectifs,

Tous les jours, ne faire envahir par la tristesse est un combat permanent,

Tous les jours, trouver le positif.

La dépression, c’est quelque chose d’invisible, pas forcément facile à vivre parce que les gens qui t’entourent ne savent pas forcément tout, ne savent pas forcément comment faire, ne savent pas comment te parler.

J’essaie de faire de mon mieux.

On pourrait croire que je vais bien, mais ça me coute énormément d’énergie. Je sais que j’y arriverai mais pour l’instant je prends soin de moi.

Je ne mords pas, c’est certain. ☺️

Parfois, j’ai envie de vous transmettre mes pensées. Souvent je me ravise car je sais que je peux avoir un effet boomerang pas forcément sympa.

Jusqu’à présent, les petits retours de boomerang sont sympas, mais je redoute les retours négatifs, ils arriveront un jour cest sûr.

Souvent, je me dis pourquoi… ?

Souvent, je n’ai pas la réponse. J’essaie de faire de mon mieux.

La dépression, c’est quelque chose qu’on peut lire un peu partout. Mais en parler vraiment de ce qu’on peut vivre, j’ai pas vu beaucoup de témoignages. Je vois souvent des définitions.

Est-ce que c’est moi ? Peut être que oui. Peut être que non.

Mais la dépression c’est un cercle vicieux, mais méchamment vicieux qu’il en est difficile de sortir. Il faut vraiment se faire violence. Il ne suffit pas d’un petit traitement, un psy, du repos et hop le problème est réglé !

Non, non, non, ça ne marche pas comme ça. Ça serait trop facile…

Quand je stresse, j’essaie de faire quelque chose qui me détend,

Quand j’angoisse, j’essaie de lâcher prise,

Quand je ne comprends pas, je sais que je comprendrai à un moment et que ce n’est pas maintenant.

Comment pouvez-vous réagir ou aider une personne dépressive ?

  • Proposer votre écoute sans jugement,
  • Faire des sorties positives,
  • Prendre de ses nouvelles de temps à autre.

J’apprends à relativiser malgré toutes ces situations.

Viens écouter à travers mes oreilles !

Sophie, bébé joufflu à un an dans une robe avec un sourire aux lèvres. Les mains sur un tronc d'arbre pour se tenir en équilibre. La photo est un peu passée en couleurs.

Avec mes implants cochléaires, je redécouvre le son différemment et je suis avide de découvertes ! 

Récemment, la question suivante m’a été posée : tu entendais comment avant ? 
J’avoue, je m’en rappelle plus même si ça ne fait que 6 ans que je suis bi-implantée.
Je ne peux que m’en rappeler si je relis mes écrits, je vois une évolution dans mes récits. 

Je m’étonne moi-même. 

C’est vrai que les premiers sons que j’ai entendus étaient sous forme électronique, mais ce moment-là s’est effacé petit à petit que j’ai avancé dans mon expérience de l’implant cochléaire. 

Avant, le bruissement des feuilles sous le vent je ne pouvais pas les entendre. Aujourd’hui, c’est un son qui m’est doux à écouter. 
J’en suis presque nostalgique parce que je me rends compte que mon audition a beaucoup évolué. 

Au début quand j’ai eu mes implants, les premiers sons étaient perturbants. Cela ne ressemblait absolument pas à ce que j’avais pu entendre avec mes appareils auditifs. J’ai dû réapprendre à entendre et à comprendre. 

J’ai dû me ré-approprier tous ces sons. Je me rappellerai toujours la première séance chez l’orthophoniste. Elle a duré une heure. Je remercie intérieurement cette orthophoniste d’avoir pris le temps de cette première heure. Ça ne faisait que 15 jours que je les avais. La première séance a consisté à identifier des bruits qui se passaient dans mon dos. 
C’est un peu violent quand on a toujours identifié visuellement. Le but était quand même de voir s’il y avait une amélioration ou la provoquer si je peux dire. Les premiers bruits en séance furent le tintement des clés, le froissement du papier, les pas de l’orthophoniste, l’applaudissement, et l’eau.
J’ai appris à identifier, à force de répétition, deux fois par semaine, pendant 6 mois dans un premier temps…

Le cerveau est un organe merveilleux quand on est motivés à le faire travailler. 

Aujourd’hui, je dirais que les sons que j’avais avec les appareils, je les ai aujourd’hui mais beaucoup plus nets, plus précis. 
Pourquoi ? parce que j’ai récupéré des fréquences dans les aigus que je n’avais pas avec les appareils. Ces fréquences aigües font la différence dans ce qu’on entend, elles sont là pour affiner le son, le rendre plus précis et perceptibles.

S’il y a des orthophonistes dans la salle, je prends les infos ! Vrai ou faux ? 

Aujourd’hui, je peux tout à fait entendre le bruit des griffes de chat sur le parquet. Je trouve ça rigolo. 
Il m’arrive parfois d’entendre via Facetime, un proche qui part chercher quelque chose et qui revient. J’entends ses pas sur le parquet. 
C’est perturbant de savoir que j’entends ça, ou plutôt que je peux l’entendre. 

Beaucoup sont surpris quand je leur dis : même se frotter les mains ça fait du bruit. 

C’est surtout ça qui m’a surprise après mon opération, c’est cette richesse de sons présente partout et tout le temps. 🙂

Jour 16 – La photo n’a rien à voir avec le billet, quoique si un peu quand même. J’ai un an sur cette photo. Je l’adore en fait, j’ai une patate d’enfer et on me reconnaît aisément je trouve.

Je ris aussi aux blagues à deux balles !  

Sophie cachée par des balles en plastique blanches

– « Attends »
– « Non, c’est pas la peine que je te raconte »
– « C’est une blague à 2 balles »
– « Pas maintenant, plus tard »

La période des fêtes arrive. 
Je ne l’aime pas pour la simple raison, je sais d’avance que je ne vais pas tout comprendre. Quel que soit l’entourage, il y aura toujours un moment de flottement. J’aimerais parfois l’éviter pour m’éviter de la souffrance ou de la frustration, pour ne garder que les meilleurs moments. Je sais qu’en évitant ces moments, je m’exclus toute seule et ça serait dommage. 

Continuer la lecture de « Je ris aussi aux blagues à deux balles !   »

Être sourde et mère

enfant accroché à un élastique qui saute en l'air

Avant même de mettre au monde mon minipixel-qui-est-plus-si-mini, j’ai appréhendé cette nouvelle expérience.

La maternité, en étant sourde, a été particulière. 

Particulière parce que personne n’était sensibilisé à la surdité quand j’ai été enceinte. Expliquer à plusieurs reprises au personnel soignant que je n’entends pas. Mon gynécologue était sur une autre planète.

Particulière parce qu’on me demandait s’il serait comme moi. Quelle importance ? C’est mon bébé.

Particulière parce que les cours de préparation à l’accouchement n’étaient pas accessibles, j’ai eu des fous rires incontrôlables parce que je comprenais pas le sens de ce que je faisais que j’en ai été exclue.

Particulière parce que dans une salle d’accouchement, il y a du monde et l’information circule vite à l’oral. Ce n’était marqué nulle part que je n’entends pas. Perturbant quand tu entends ta patiente parler et qui ne te répond pas parce qu’elle ne t’a pas entendue.

Être sourde et mère, c’est une grosse interrogation.

Je me demandais comment je ferais pour l’entendre pleurer la nuit par exemple. Beaucoup me disaient c’est pas grave, tu peux compter sur le papa. 

Pour moi, il est question d’égalité vis à vis de notre enfant. 
À n’importe quel moment dans notre vie. 

Il n’est pas imaginable pour moi de manquer d’informations sur la maternité, j’ai avalé toutes les lectures possibles, parcouru tous les forums, les sites internet de l’époque. Quelle expérience ! 

J’avais un système adapté qui m’a permis de pouvoir me lever la nuit, de « l’entendre » pleurer comme on dit. Souvent mon instinct de maman était juste. Il m’a suffi de me faire confiance pour que je me réveille quelques minutes avant lui pour me lever. Il m’est arrivé comme tout parent de me lever la nuit pour voir s’il respirait encore. 

Quand une lumière s’allumait sur mon système, c’était une source de stress supplémentaire. Je ne pouvais pas savoir s’il était en train de babiller dans son berceau, de pleurer, de discuter avec ses peluches, de tousser. Je n’ai pas eu de bébé qui a fait des bronchiolites, où il est nécessaire d’écouter sa toux et sa respiration si elle était sifflante ou pas. Je n’ai pas eu à m’inquiéter pour mon fils la nuit quand il était bébé. 

Je me suis demandé comment j’allais communiquer avec mon bébé. Je connais la langue des signes, je la lui ai apprise. Quand il a eu 1 an et demi, on avait une relation fusionnelle car il s’exprimait en langue des signes. Cela suscitait parfois de la surprise dans notre entourage.

Quand il a commencé à parler, une nouvelle angoisse est arrivée. Et s’il s’adressait plus à son père qu’à moi ? Finalement, notre fils s’est adressé de la même manière à moi qu’à son père. Spontanément, il se mettait devant moi pour me parler distinctement. Il est arrivé que je lui demande d’articuler ou de reformuler mais c’est tout. Tout le monde était comme sa maman et son papa. Il n’a pas fait la différence.

Quand il a fallu rencontrer les enseignants de maternelle et de primaire, j’ai tout de suite parlé de ma surdité. Je n’étais certes pas le parent référent d’urgence au téléphone mais la communication se passait bien quand j’allais le chercher à l’école. 

Avec le temps, les choses ont évolué. Il est arrivé que la communication soit compliquée à cause de la crise d’adolescence, mais je crois que tous les parents y sont confrontés d’une manière ou d’une autre.

La frustration que j’ai eue et que j’ai encore est quand je croise des copains et copines de mon fils qui ne savent pas que je suis sourde, je ne sais jamais sur quel pied danser. Je suis sourde et je parle. C’est peut être un peu atypique pour les jeunes qui ne me connaissent pas et qui n’ont jamais rencontré de personnes comme moi.

Aujourd’hui, mon fils oublie que je n’entends pas. Je suis obligée de lui rappeler quand je ne le vois pas et donc je ne l’entends pas. Être sourde et maman, c’est possible.

Les situations ne sont plus les mêmes avec un adolescent de 15 ans, mais on s’adapte continuellement !